A l’issue d’un vote serré, le Parlement européen a adopté, début février, une directive autorisant les nouvelles techniques génomiques (NTG) sur notre continent. Celles-ci faciliteront la transition écologique. Mais pourquoi donc les associations et partis écologistes s’y opposent-ils ?
Le changement climatique expose de larges régions du globe à des températures extrêmes qui vont affecter la production agricole dont les populations ont besoin pour vivre. Heureusement, grâce aux NTG, il est scientifiquement possible d’adapter les espèces aux modifications climatiques : résistance à la chaleur et aux ravageurs (ce qui rend bon nombre d’insecticides inutiles), arrosage minimal, réduction des engrais et produits phytopharmaceutiques (qui polluent l’eau et dont la production et le transport émet beaucoup de CO2 pour leur production ou leur transport). Cela permettra aussi d’augmenter les rendements, sans étendre la superficie des terres cultivables et donc sans augmenter les émissions de gaz à effet de serre. Des chercheurs ont déjà mis au point des variétés de manioc, de banane ou de maïs résistantes à certains effets du changement climatique et prêtes à être cultivées.
Hélas, la grande majorité des associations et partis écologistes en Europe s’oppose avec âpreté aux NTG au nom du principe de précaution, alors qu’il n’existe pas la moindre preuve de leur nocivité. Le principe de précaution invite plutôt à règlementer sans tarder ces NTG. C’est l’avis de 35 Prix Nobel qui ont adressé une lettre ouverte aux parlementaires européens. Ils estiment que l’interdiction des NTG pourrait coûter 300 milliards d’euros par an à l’économie européenne car elle encouragerait le maintien de législations lourdes et contraignantes, favorisant paradoxalement les grands semenciers au détriment des sociétés de biotechnologie de l’Union. A cet égard, le texte voté au Parlement européen va dans la mauvaise direction car il interdit la brevetabilité des NTG.
Ce rejet du progrès scientifique au service de l’environnement et du bien-être s’explique par un refus de toute solution ne passant pas par une réduction drastique de la consommation, c’est-à-dire la décroissance. Dès lors, tout ce qui permet de préserver la prospérité et de l’étendre au reste du monde doit être banni. C’est aussi pourquoi le mouvement écologiste s’oppose au nucléaire (qui permet de produire de l’électricité sans émettre du CO2) aux procédés de capture de CO2 (pour décarboner l’industrie), à la voiture électrique, au carburant synthétique neutre en CO2 (car fabriqué à partir d’hydrogène et de CO2 capté), à l’avion « vert », à la digitalisation, aux OGM et, aujourd’hui, aux NTG. La solution n’est pourtant pas de réduire la consommation mais de faire en sorte que la consommation n’exerce plus d’impact négatif sur l’environnement. Il faut aider les pays émergents à accéder à ces biotechnologies dont dépend leur survie, au lieu de s’y refuser pour des raisons idéologiques, ce qui constitue en ouvre une forme de néocolonialisme vert.
Ce dossier, à envisager dans le contexte des récentes protestations du monde agricole face aux normes déconnectées des réalités paysannes, démontre que le dilemme entre une agriculture performante et une agriculture respectueuse de l’environnement n’existe pas. Il est tout à fait possible de concilier les deux et cela se fera non par une stratégie de la décroissance culpabilisante et sans issue mais par la voie de la prospérité, de l’innovation et de l’intelligence.
– Un peu de vocabulaire –
Les croisements
Utilisés depuis le Néolithique, ils consistent à croiser une plante sauvage et une variété cultivée pour rendre cette dernière plus résistante.
Les Organismes Génétiquement Modifiés (OGM)
Ils résultent du transfert d’un ou plusieurs gènes dans des espèces hôtes. Bannies par la plupart des pays européens, les cultures d’OGM représentaient 190 millions d’hectares en 2019, soit 12% de toutes les surfaces cultivées au niveau mondial. Beaucoup de pays européens importent ces produits, comme les tourteaux de soja destinés à l’alimentation d’animaux d’élevage.
Les Nouvelles Techniques Génomiques (NTG)
Elles visent à modifier un gène existant afin de le rendre conforme au gène plus performant d’une espèce sauvage.
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